Notion :
Le travail
Thèse
de l’opinion commune :
Nous
vivrions plus heureux
sans travailler car nous n’aurions pas d’effort à fournir.
Critique :
Il
ne s’agit là, nécessairement, que d’une logique individuelle :
il faut bien qu’il y en ait certains qui travaillent pour répondre
à nos besoins. Ceux qui sont contraints à travailler pour les
autres sont, dans l’Antiquité grecque, les esclaves qui servent
les hommes libres, qui sont deux statuts sociaux différents. Dans
une fiction futuriste, qui n’est plus si éloignée que cela, d’un
monde régi par les machines, seuls ceux qui devront programmer et
ceux qui devront entretenir les machines seront toujours contraints
au travail. Ainsi, le travail reste, malgré tout, une nécessité.
De
plus, il faut bien se soumettre aux contraintes car :
-
il
faut survivre en gagnant sa vie.
-
il
faut s’intégrer à la société,
y trouver sa place, se socialiser.
-
il
faut combattre le sentiment d’inutilité sociale que peuvent
ressentir certains chômeurs.
-
il
faut travailler car le travail a, en lui-même, une valeur morale :
le travail est associé au courage.
-
il
faut combattre l’ennui : le travail peut être un moyen en
vue de cette fin.
« le
travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui,
le vice et le besoin »
Voltaire
(1694 – 1778)
« La
renaissance perpétuelle des besoins nous accoutume au travail. Mais
dans les intervalles où les besoins sont satisfaits et pour ainsi
dire endormis, c’est l’ennui qui nous prend. […] Pour
échapper à l’ennui, l’homme, ou bien travaille au-delà de ce
qu’exigent ses besoins normaux, ou bien il invente le jeu,
c’est-à-dire le travail qui n’est plus destiné à satisfaire
aucun autre besoin que celui du travail pour lui-même. »
Nietzsche,
Humain,
trop humain,
1878, I, IX : « L’homme
seul avec lui-même »,
611 : « L’ennui
et le jeu. »,
Folio essais, Page 320
Exemple :
Certains (jeunes) retraités reprennent une activité
professionnelle, non pour des raisons financières, mais parce que le
travail leur plaît, et tout ce qui va avec (vie sociale, sentiment
d’être utile, valorisation personnelle, être occupé).
Le
travail permet également d’apprendre : cela permet
d’apprendre des savoirs, des savoir-faire, mais cela permet
également la connaissance de soi. En effet, tout travail est un
ensemble de défis qu’il s’agit de relever, de dépasser en
dépassant ce que l’on pensait être nos limites. Le travail permet
également de découvrir des aspects par nous insoupçonnés de notre
personnalité.
Paradoxe :
La
vision que l’opinion commune a du travail est ambivalente :
d’une part, le travail est associé à l’effort douloureux, à la
contrainte, et à la soumission ; et, d’autre part, il est
source de vie sociale, ce qui combat le sentiment d’inutilité et
l’ennui, la marque des courageux, la source d’une certaine
satisfaction, et ce qui nous permet d’apprendre sur le monde et sur
nous-mêmes.
Définition :
Le
travail dont il est ici question désigne l’effort de
transformation d’une matière première, que celle-ci soit
matérielle ou spirituelle, intellectuelle. Par exemple,
le potier façonne l’argile, le sculpteur façonne la pierre ;
l’écrivain façonne la langue.
Un
fardeau est une charge pesante qu’il faut lever ou transporter. Au
sens figuré, c’est une obligation difficile à supporter, un
poids.
La question est de savoir si le travail constitue un aspect de
notre existence difficile à supporter, dont il serait bénéfique de
se libérer, ou bien s'il constitue, au contraire, ce
qui nous porte, et non ce qui nous écrase.
Afin de répondre à cette question, nous verrons d'abord
que le travail peut être considéré comme étant un poids difficile
à supporter. Cependant, nous devrons montrer que l’activité
qu’est le travail peut, au lieu de nous écraser, nous porter dans
l’existence. Enfin, nous verrons que le travail peut, à
l’échelle de la société, constituer un fardeau, mais un fardeau
dont il nous faudra nous accommoder.
I
/ Le poids écrasant du travail :
Le travail est source de tourments. Dans la langue, l’expression
« être travaillé par une idée » signifie « être
tourmenté par une idée ».
A
/ La dépréciation chrétienne du travail :
Dans
le texte biblique, le travail est présenté comme étant le
châtiment divin répondant au péché originel d’Adam et d’Eve.
Adam
est condamné au travail manuel de la terre :
« Parce
que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre
dont je t’avais interdit de manger,
[…]
A
force de peines tu en tireras [du sol] subsistance
Tous
les jours de ta vie.
Il
produira pour toi épines et chardons et tu mangeras l’herbe des
champs.
A
la sueur de ton visage
Tu
mangeras ton pain
Jusqu’à
ce que tu retournes au sol »
Genèse,
3, 17 à 19
Eve
est également condamnée, mais à un autre type de travail :
celui de l’accouchement.
« Je
multiplierai les peines de tes grossesses,
Dans
la peine tu enfanteras »
Genèse,
3, 16
B
/ Le travail est la torture des esclaves, des exploités :
L'étymologie
latine du terme de travail nous fait associer cette notion à un
fardeau, c'est-à-dire à quelque chose de difficile à supporter, de
lourd à porter. En effet, le terme « travail » vient du
latin populaire tripaliare
qui signifie « être torturé par le trepalium ».
Le trepalium
désigne un instrument de torture :
Le
travail est une torture car il met à mal notre corps lors de
l’effort de transformation de notre matière première.
Cette
torture, cet effort douloureux qu’est le travail était déchargé,
sous l’Ancien Régime français, sur les paysans du Tiers-Etat. Le
noble a le privilège de ne pas s’abaisser à travailler, la terre
notamment.
Dans
la Cité grecque antique, le travail qui répond aux besoins de la
société est relégué aux esclaves qui servent les hommes libres
qui, eux, peuvent ne pas travailler manuellement et, par conséquent,
s’occuper de politique (et donc de guerre qui n’est qu’un
prolongement de la politique, selon Clausewitz [1780 – 1831]),
d’art, de philosophie … etc.
C
/ L’esclavage selon Aristote :
Si
le travail manuel est si déprécié dans la Cité grecque antique,
ce n’est pas parce qu’il est l’activité des esclaves :
c’est avant tout parce qu’il ne permet pas de faire de nous des
hommes. L’esclave qui travaille est alors, selon Aristote,
comparable à un animal parce qu’il ne s’occupe que de la
satisfaction des besoins humains, des siens comme de ceux de la
société dont font partie les hommes libres qui, eux, possèdent la
dignité de s’élever au-dessus des besoins primitifs.
Etude
de texte de Hannah Arendt, philosophe du XXème
siècle :
« Dire que le travail et l’artisanat étaient méprisés dans
l’Antiquité parce qu’ils étaient réservés aux esclaves, c’est
un préjugé des historiens modernes. Les Anciens faisaient le
raisonnement inverse : ils jugeaient qu’il fallait avoir des
esclaves à cause de la nature servile de toutes les occupations qui
pourvoyaient aux besoins de la vie. C’est même par ces motifs que
l’on défendait et justifiait l’institution de l’esclavage.
Travailler, c’était l’asservissement à la nécessité, et cet
asservissement était inhérent aux conditions de la vie humaine. Les
hommes étant soumis aux nécessités de la vie ne pouvaient se
libérer qu’en dominant ceux qu’ils soumettaient de force à la
nécessité. La dégradation de l’esclave était un coup du sort,
un sort pire que la mort, car il provoquait une métamorphose qui
changeait l’homme en un être proche des animaux domestiques. C’est
pourquoi si le statut de l’esclave se modifiait, […] si un
changement des conditions politiques générales élevait certaines
occupations au rang d’affaires publiques, la « nature »
de l’esclave changeait automatiquement.
L’institution de l’esclavage dans l’Antiquité, au début
du moins, ne fut ni un moyen de se procurer de la main-d’œuvre à
bon marché ni un instrument d’exploitation en vue de faire des
bénéfices ; ce fut plutôt une tentative pour éliminer des
conditions de la vie le travail. Ce que les hommes partagent avec les
autres animaux, on ne le considérait pas comme humain. (C’était
d’ailleurs aussi la raison de la théorie grecque, si mal comprise,
de la nature non humaine de l’esclave. Aristote, qui exposa
si explicitement cette théorie et qui, sur son lit de mort, libéra
ses esclaves, était sans doute moins inconséquent que les Modernes
n’ont tendance à le croire. Il ne niait pas que l’esclave fût
capable d’être humain ; il refusait de donner le nom d’
« hommes » aux membres de l’espèce humaine tant qu’ils
étaient totalement soumis à la nécessité.) »
Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, 1958, Chapitre
III : « Le travail », « Le travail de notre
corps et l’œuvre de nos mains », Pocket, Pages 127 à 129
Introduction :
Dans
cet extrait de Condition de l’homme moderne consacré au
travail, Hannah Arendt déconstruit le préjugé de certains
historiens modernes, et aussi celui du sens commun, sur la condition
des esclaves dans l’Antiquité, grecque notamment. Selon Arendt,
l’esclave n’est pas méprisé parce qu’il est esclave, mais
parce qu’il travaille en vue de répondre aux besoins de la
société, ce qui le rappelle à sa nature d’être animal et qui,
par-là, le rend proche des animaux, plus éloigné de ce qu’est un
homme d’ores et déjà entré dans l’état civil. Ainsi, pour
comprendre comment fonctionne l’esclavage dans l’Antiquité
grecque, il faut avoir en tête comment était considéré le
travail, c’est-à-dire, ici, la transformation de la matière en
vue de satisfaire nos besoins. Arendt, en tant que philosophe et
qu’historienne, participe à cette démarche. Il ne s’agit pas
ici de légitimer, de défendre l’esclavage, mais de comprendre
quel sens une telle institution avait à l’époque, pour ne pas
tomber dans des caricatures, des simplifications qui nous
éloigneraient de la vérité.
Ainsi,
la question est ici de savoir comment était considéré le
travail manuel et la condition des esclaves dans l’Antiquité
grecque.
Afin
de répondre à cette question, nous verrons d’abord la
déconstruction du préjugé moderne selon lequel l’esclave est
méprisé en tant que tel : s’il est méprisé, c’est parce
que son activité le rend proche des animaux (lignes 1 à 10).
Cependant, Arendt évoque tout de même la question de
l’affranchissement de certains esclaves (lignes 10 à 12). Elle en
vient par la suite à déconstruire un autre préjugé selon
lequel l’institution de l’esclavage n’avait qu’essentiellement
un intérêt économique (lignes 13 à 18). Enfin, elle
s’attarde sur l’exemple d’Aristote, fervent défenseur de
l’esclavage mais qui, pourtant, à la fin de sa vie, a affranchi
ses esclaves (lignes 18 à 22).
I
/ Lignes 1 à 10 :
Arendt
commence par dénoncer le préjugé de certains historiens modernes
qui font passer le mépris du travail, et notamment du travail
artisanal, pour un mépris de la condition d’esclave.
Or,
il faut inverser le rapport entre ces choses : il ne faut pas
penser du mépris de l’esclave au mépris du travail artisanal,
mais du mépris du travail artisanal au mépris de l’esclave. Ce
n’est pas l’esclave qui est méprisé dans l’Antiquité
grecque, c’est son activité, son travail. En effet, le travail,
pour les Anciens, rend esclave, non aux maîtres, mais aux besoins
corporels, naturels : le seul rôle des esclaves est de pourvoir
aux besoins, ce qui est méprisable. Arendt parle d’un
« asservissement à la nécessité » (lignes 5 – 6)
naturelle, aux besoins. Or, un homme n’est pas fait que pour
satisfaire ses besoins : il peut et il doit avoir d’autres
visées, d’autres fins, plus nobles, pour correspondre à ce qu’est
un homme. Ce qui fait la grandeur de l’homme, ce qui fait même un
homme, pour Aristote, c’est tout ce qui paraît inutile, c’est
l’activité absolument désintéressée que Kant qualifiera de
morale. L’inutilité, ici, c’est l’art, la politique qui
cherche à rendre les hommes meilleurs, et la philosophie :
c’est dans ce type d’activités intellectuelles que se trouve
l’essence de l’homme, qui est bien plus qu’un vulgaire animal.
Celui qui ne vit que pour satisfaire ses besoins est alors asservi à
son corps, et ne vit que comme un animal : c’est là la
condition, très peu enviable (« un sort pire que la mort »
(ligne 9)), de l’esclave, qui n’est plus totalement un homme.
II
/ Lignes 10 à 12 :
Arendt
relève tout de même que l’esclave n’était pas considéré
comme étant naturellement déterminé à être asservi aux besoins
naturels du corps, et, plus largement, de ceux de la société. En
effet, le statut de l’esclave pouvait changer : c’est le
fait d’être affranchi par exemple. Ainsi, l’esclave ne l’est
pas par nature, mais par convention sociale, car il y en faut bien
qui s’occupent de faire manger la société. Certes leur sort n’est
pas enviable, mais il n’est pas définitif, même si certains
restent esclaves toute leur vie.
On
remarque tout de même que, dans la conception des Anciens, le
travail est vu comme une peine, un fardeau dont il faut se décharger,
ici, sur certains, sur ceux que l’on appelle les esclaves.
III
/ Lignes 13 à 18 :
Arendt
en vient alors à déconstruire un préjugé, un fantasme même, à
propos de l’esclavage de l’Antiquité grecque : on confond à
tort esclavage et exploitation. En effet, les maîtres ne sont pas
les bourgeois qui profitent du travail des prolétaires comme
pourraient le dire les marxistes. Dans l’Antiquité grecque, s’il
y a des esclaves, c’est en raison de l’organisation de la Cité
qui cherche à éradiquer la nécessité naturelle (c’est le rôle
des esclaves) pour pouvoir se consacrer enfin à autre chose, à des
activités moins animales, plus humaines. Ainsi, effectivement,
l’esclave n’est pas considéré comme un homme, mais comme un
animal, mais parce que c’est là sa fonction sociale, et non sa
nature.
IV
/ Lignes 18 à 22 :
Arendt
en vient alors à porter la réflexion sur un exemple précis :
Aristote. Aristote disposait d’esclaves et défendait cette
institution sociale. Pourtant, à la fin de sa vie, il les
affranchit. Les Modernes y ont vu une incohérence, une contradiction
entre le discours et les actes. Arendt rétablit alors le bon sens
d’Aristote en expliquant qu’il « ne niait pas que l’esclave
fût capable d’être humain. » (ligne 20). L’esclave
deviendra humain le jour où il cessera de travailler pour s’occuper
des activités proprement humaines.
Transition :
Pourtant, bien que le travail soit un fardeau au point que l’homme
ait tendance à vouloir s’en décharger, ne faut-il pas, au lieu de
chercher à s’en débarrasser, au contraire le porter par
nous-mêmes ? N’y a-t-il pas une valeur à porter son propre
fardeau, à réaliser son propre travail ? N’est-ce pas en
assumant sa tâche difficile que l’homme se réalise en tant
qu’homme ? N’est-ce pas en travaillant que l’homme se
libère à l’égard de la nature qu’il transforme, ce qui fait de
lui un homme ?
II
/ Le travail : une activité épanouissante et libératrice.
A
/ Le travail réalise l’homme :
Le
travail, bien que difficile, même si nous aimerions l’éviter, est
ce qui permet le développement de nos capacités.
Texte
de Kant :
« La
nature a chassé [l’homme] de l’existence d’innocence enfantine
tranquille, comme d’un jardin où il trouvait dans l’insouciance
sa subsistance, et l’a précipité dans le vaste monde, où tant de
soucis, de peines, de maux inconnus l’attendaient. Dans l’avenir,
les difficultés de la vie lui arracheront plus d’une fois le
souhait d’un paradis, création de son imagination, où il
pourrait, dans une oisiveté tranquille et une paix perpétuelle,
passer son existence à rêver ou à folâtrer. Mais entre lui et ce
séjour imaginaire de délices, se pose la raison inexorable, qui le
pousse irrésistiblement à développer les facultés placées en
lui, et ne lui permet pas de retourner à l’état de rusticité et
de simplicité d’où elle l’avait tiré. Elle le pousse à
supporter patiemment la fatigue qu’il hait, à rechercher le faux
éclat qu’il méprise, à oublier même la mort qui le fait
frissonner, au profit de toutes ces bagatelles dont la perte
d’effraie encore plus. »
Kant,
La
philosophie de l’histoire,
« Conjectures sur les débuts de l’histoire humaine »,
Traduction S. Piobetta, Aubier-Montaigne, Pages 160 – 161
Kant
reproche à ceux qui rêvent d’un monde sans travail, d’un Jardin
d’Eden dans lequel tout serait à la disposition des hommes, le
fait qu’ils oublient que le travail est aussi ce qui développe en
nous nos capacités. Ainsi, c’est la raison, au sein même de la
condition humaine, qui fait que nous trouvons avantage à cette
activité que nous détestons : le travail.
Outre
le fait qu’il développe nos facultés naturelles, le travail
réalise l’essence de l’homme qui est de n’être pas qu’un
animal. L’homme refuse de n’être que sa nature biologique.
L’homme nie son animalité par le travail, c’est-à-dire par la
transformation de la nature extérieure : il s’éduque,
transforme sa nature intérieure, en travaillant.
Texte
de Georges Bataille, écrivain français du XXème
siècle
:
« Je
pose en principe un fait peu contestable : que l’homme est
l’animal qui n’accepte pas simplement le donné naturel, qui le
nie. Il change ainsi le monde extérieur naturel, il en tire des
outils et des objets fabriqués qui composent un monde nouveau, le
monde humain. L’homme parallèlement se nie lui-même, il s’éduque,
il refuse par exemple de donner à la satisfaction de ses besoins
animaux ce cours libre, auquel l’animal n’apporte pas de réserve.
Il
est nécessaire encore
d’accorder que les deux négations que, d’une part, l’homme
fait du monde donné et, d’autre part, de sa propre animalité,
sont liées.
Il ne nous appartient pas de donner une priorité à l’une ou à
l’autre, de chercher si l’éducation (qui apparaît sous la forme
des interdits religieux) est la conséquence du travail, ou le
travail la conséquence d’une mutation morale. Mais tant qu’il y
a homme, il y a d’une part travail et de l’autre négation par
interdits de l’animalité de l’homme. »
Georges
Bataille, L’Erotisme,
1957
Le
travail, pour réaliser l’homme, doit être proprement humain selon
Marx, c’est-à-dire
qu’il doit exprimer :
-
la
subjectivité du travailleur dans un projet,
-
la
rationalité dans l’invention des moyens à mettre en œuvre,
-
et
la volonté dans l’effort sur soi pour continuer à réaliser le
projet.
Un
exemple
d’un tel travail est la perruque,
c’est-à-dire le travail personnel clandestin des ouvriers
travaillant en usine, notamment dans les années 1970 : en
détournant les matériaux rejetés par la machine productrice, les
ouvriers construisaient des objets du quotidien pour connaître la
satisfaction d’exécuter, mais aussi de penser cette exécution, de
laisser transparaître leur subjectivité dans leur production, comme
leur ingéniosité et leur volonté. En vue de retrouver l’humanité
de leur activité, la perruque semble être nécessaire aux ouvriers
travaillant en usine.
Définition :
Perruque : En argot d’artisan, faire une perruque signifie
« travailler pour soi pendant son temps de travail, souvent
avec des matériaux détournés ». L’expression provient de
l’idée de trompe-l’œil que crée le postiche.
Texte :
« Les
différentes sortes de perruques n’obéissent qu’à une seule et
unique règle : la taille de l’objet fabriqué ne doit pas
être trop grande pour empêcher que l’on puisse le sortir en
fraude. Certains ne se plient pas à cette règle, et les objets
qu’ils fabriquent restent à prendre la poussière dans leur
placard ou à côté de leurs machines ; le jour où ils
quittent l’usine, ils essayent de les sortir sans être pris et, si
cela apparaît sans espoir, ils les offrent à quelqu’un d’autre.
[…]
la matière première, c’est surtout du métal. Sont ainsi
exécutés : porte-clefs, supports pour pots de fleurs,
cendriers, plumiers, règles et équerres, salières pour le petit
déjeuner pris à l’usine, tapis de bain (faits de copeaux blancs
de polystyrène), jetons en acier inoxydable pour apprendre à
calculer aux enfants (un cadeau magnifique), pendentifs faits d’une
dent de fraise cassée, roulettes miniatures, dés, porte-savons
aimantés, antennes de télévision (à monter chez soi), fixations
de sécurité et portemanteaux pour les placards d’atelier […].
L’ordre
« il faut faire ça » est remplacé par une question :
« qu’est-ce qu’il est possible de faire ? ». […]
Les possibilités ne sont pas illimitées ; mais l’ouvrier
qui s’adonne à la perruque fait marcher sa tête,
s’informe. Il passe en revue le matériel qu’il a autour de lui,
examine les possibilités non utilisées autres que celles offertes
par sa machine : celles des petites machines auxiliaires, de la
machine à cisailler les plaques dans le coin de l’atelier, de la
meule, des outils à main qui sont à sa disposition ; et il
décide. Il décide qu’il va créer quelque chose, puis il
travaille à réaliser ce qu’il a décidé. […] S’il se sert de
son produit, il éprouve surtout la jouissance de l’avoir créé
lui-même, de savoir quand, comment, avec quoi il l’a fait, de
savoir que c’est lui qui décide de cette existence.
Ce
travail en perruque […] exécuté en cachette et au prix de grands
sacrifices […] est la seule possibilité, le germe et le modèle
tout à la fois d’un travail libre et créatif. »
Miklos
Haraszti, Salaire
aux pièces,
1975, Traduction J. Svaradja et J. Aizac, Seuil, 1976, Pages 139 à
141
Texte
de Marx :
« Le
travail est de prime abord un acte qui se passe entre l’homme et la
nature. L’homme y joue lui-même vis-à-vis de la nature le rôle
d’une puissance naturelle. Les forces dont son corps est doué,
bras et jambes, tête et mains, il les met en mouvement, afin de
s’assimiler des matières en leur donnant une forme utile à sa
vie. En même temps qu’il agit par ce mouvement sur la nature
extérieure et la modifie, il modifie sa propre nature, et développe
les facultés qui y sommeillent. Nous ne nous arrêterons pas à cet
état primordial du travail où il n’a pas encore dépouillé son
mode purement instinctif. Notre point de départ c’est le travail
sous une forme qui appartient exclusivement à l’homme. Une
araignée fait des opérations qui ressemblent à celles du
tisserand, et l’abeille confond par la structure de ses cellules de
cire l’habileté de plus d’un architecte. Mais ce
qui distingue dès l’abord le plus mauvais architecte de l’abeille
la plus experte, c’est qu’il a construit la cellule dans sa tête
avant de la construire dans la ruche.
Le résultat auquel le travail aboutit, préexiste idéalement dans
l’imagination du travailleur. Ce n’est pas qu’il opère
seulement un changement de forme dans les matières naturelles ;
il y réalise du même coup son propre but dont il a conscience, qui
détermine comme loi son mode d’action, et auquel il doit
subordonner sa volonté. Et cette subordination n’est pas
momentanée. L’œuvre exige pendant toute sa durée, outre l’effort
des organes qui agissent, une attention soutenue, laquelle ne peut
elle-même résulter que d’une tension constante de la volonté. »
Marx,
Le
Capital,
1867, I, III, Chapitre VII, Traduction J. Roy, Editions Sociales,
Pages 139 – 140
B
/ Le travail rend libre :
Avant
d’être le fronton du camp de concentration et d’extermination
d’Auschwitz pour faire croire aux arrivants à un camp de travail
(en vue d’éviter les mouvements de panique), et aussi pour
humilier les prisonniers qui rêvaient de liberté, un tel titre
peut, en se détachant totalement de ce contexte historique, se
justifier philosophiquement.
En
effet, le travail permet de gagner sa vie, d’être indépendant.
Le
travail est une activité libératrice en elle-même, et non
seulement pour les conséquences dont on profite comme l’argent
gagné : l’esclave qui travaille est plus libre que son
maître qui, lui, est l’esclave de son désir et du travail
de son esclave.
« On pense que l’esclave est celui qui agit par commandement
et l’homme libre celui qui agit selon son bon plaisir. Cela
cependant n’est pas absolument vrai ; en réalité, être
captif de son plaisir et incapable de rien voir ni faire qui soit
vraiment utile, c’est le pire esclavage, et la liberté n’est
qu’à celui qui de son entier consentement vit sous la conduite de
la Raison. »
Spinoza,
Traité
théologico-politique,
1670, Traduction Appuhn, GF
L’esclave
prend conscience qu’il est libre car :
-
il se rend maître de la nature qu’il est capable de transformer
en fonction de sa volonté.
-
il se rend maître de lui-même en s’en tenant à un projet, en
déployant ses efforts, sa volonté, et en domptant sa propre
nature.
L’esclave
est libre car il ne cède pas à ses caprices, à ses
passions, mais est autonome.
Définitions :
Caprice :
Désir, exigence soudaine et irréfléchie. Lubie.
Passion :
Du latin passio
qui vient de pati
qui signifie souffrir. Emotion puissante qui domine la raison.
Mouvement violent, impétueux de l’être vers ce qu’il désire.
Penchant vif.
Autonomie :
Possibilité, pour un individu, de décider sans en référer à
quelqu’un. Capacité d’un individu à vivre en ne dépendant pas
d’autrui. Capacité à trouver en soi et par soi-même la loi de sa
pensée et de son action.
« A
notre insu le travail nous guérit de la partie inférieure et
presque mécanique de nos passions : ce n’est pas peu. »
Alain,
Les
Aventures du cœur
C
/ Le travail rend heureux :
« Un
travail réglé et des victoires après des victoires, voilà sans
doute la formule du bonheur. »
Alain,
Propos,
18 mars 1911
Transition :
Pourtant,
il semble que le travail soit source de conflits dans la société.
III
/ Le travail : source de conflits.
Contrairement
à ce que pense Nietzsche (que le travail permet l’ordre social en
épuisant les individus), le travail ne serait pas ce qui garantit
l’ordre social, mais, au contraire, ce qui anime les passions dans
la société. C’est parce que le travail est une nécessité pour
l’homme et pour la société (pour répondre aux besoins), c’est
parce qu’il est la condition de la survie qu’il anime les
passions humaines qui, en tant que telles, sont violentes. Le travail
serait alors le fardeau de la société, difficile à supporter,
dangereux, bien que nécessaire.
A
/ La source des conflits : le travail peut devenir aliénant.
Définition :
Aliénation : Etat de l’individu dépossédé de lui-même par
la soumission de son existence à un ordre de choses auquel il
participe mais qui le domine.
Le
travail peut devenir aliénant s’il ne s’agit plus que d’exécuter
une tâche pensée par d’autres : ce « travail »
n’est plus humain.
Texte
de Marx :
« En
quoi consiste l’aliénation au travail ? D’abord dans le
fait que le travail est extérieur
à l’ouvrier, c’est-à-dire qu’il n’appartient pas à son
essence, que donc, dans son travail, celui-ci ne s’affirme pas mais
se nie, ne se sent pas à l’aise, mais malheureux, ne déploie pas
une libre activité physique et intellectuelle, mais mortifie son
corps et ruine son esprit. C’est pourquoi l’ouvrier n’a le
sentiment d’être à soi qu’en dehors du travail ; dans le
travail, il se sent extérieur à soi-même. Il est lui quand il ne
travaille pas et, quand il travaille, il n’est pas lui. Son travail
n’est pas volontaire, mais contraint. Travail
forcé,
il n’est pas la satisfaction d’un besoin, mais seulement un moyen
de satisfaire des besoins en dehors du travail. La nature aliénée
du travail apparaît nettement dans le fait que, dès qu’il
n’existe pas de contrainte physique ou autre, on fuit le travail
comme la peste. Le travail aliéné, le travail dans lequel l’homme
se dépossède, est sacrifice de soi, mortification. Enfin, l’ouvrier
ressent la nature extérieure du travail par le fait qu’il n’est
pas son bien propre, mais celui d’un autre, qu’il ne lui
appartient pas, que dans le travail l’ouvrier ne s’appartient pas
à lui-même, mais à un autre. […]
On
en vient donc à ce résultat que l’homme (l’ouvrier) n’a de
spontanéité que dans ses fonctions animales : le manger, le
boire et la procréation, peut-être encore dans l’habitat, la
parure, etc. ; et que, dans ses fonctions humaines, il ne sent
plus qu’animalité : ce qui est animal devient humain, et
ce qui est humain devient animal. »
Marx,
Manuscrits
de 1844
Pour
illustrer la négation du travailleur qu’opère l’aliénation, on
peut faire référence au travail à la chaîne, c’est-à-dire au
fordisme du début du XXème
siècle, dans lequel l’individu n’est plus qu’un rouage de la
machine, comme Charlie Chaplin dans Les
Temps
modernes [1936].
Ici,
ce n’est plus la technique qui sert le travail de l’homme, mais
c’est le travail de l’homme qui sert celui de la technique.
L’extrait
illustre également, par les spasmes que Chaplin a lorsqu’il arrête
son activité, les dégâts physiques que peuvent avoir certains
travaux. L’Etat cherche d’ailleurs actuellement à prendre en
charge la pénibilité de certains travaux par des compensations
financières.
Enfin,
lorsque le patron interrompt la pause de l’ouvrier, cela nous
montre l’exploitation de la masse salariale pour rentabiliser au
maximum la production, pour produire toujours plus et toujours plus
vite en vue d’engranger du profit : c’est la logique
capitaliste. Le fait de pointer permet au patronat de ne payer que le
temps d’activité, et non les temps morts (pause, arrivée, départ,
déplacement). Plus actuellement que ce que montre le film, le
patronat et les syndicats d’Airbus négocient, luttent même, en
février 2016, à propos de la question de savoir si les salariés ne
devraient pas avoir l’obligation de pointer en étant déjà en
bleu de travail. Une telle disposition ferait économiser 40 minutes
par jour et par salarié au patronat qui paie actuellement ce temps
de travail qui ne lui rapporte rien. Les syndicats, eux, trouvent
cette mesure contraire aux bonnes conditions de travail, car ils
estiment que l’habillement fait partie de leur vie au travail, et
ne doit donc pas être comptabilisé sur leur temps personnel. Sur le
débat qui agite Airbus :
Au
terme de l’aliénation par le travail et par la technique, l’homme
est alors nié en tant que tel : il fait partie intégrante de
la machine, ce qui implique que les salariés sont inter-changeables,
étant donné qu’ils ne sont plus que des rouages d’une machine :
Le
travail aliéné rend alors fou.
Texte
de Marx :
« Pour
lui-même [l’ouvrier] le travail n’est pas une partie de sa vie,
il est plutôt un sacrifice de sa vie. C’est une marchandise qu’il
a adjugée à un tiers. C’est pourquoi le produit de son activité
n’est pas non plus le but de son activité. Ce qu’il produit pour
lui-même, ce n’est pas la soie qu’il tisse, ce n’est pas l’or
qu’il extrait du puits, ce n’est pas le palais qu’il bâtit. […]
Et l’ouvrier qui, douze heures durant, tisse, file, perce, tourne,
bâtit, manie la pelle, taille la pierre, la transporte, etc.,
regarde-t-il ces douze heures de tissage, de filage, de perçage, de
travail au tour ou de maçonnerie, de maniement de la pelle ou de
taille de la pierre comme une manifestation de sa vie, comme sa vie ?
Bien au contraire, la vie commence pour lui où cesse cette activité,
à table, à l’auberge, au lit. »
Marx,
Travail
salarié et Capital,
Editions Sociales
La
ruine de l’esprit est d’autant plus grande que le travail occupe
la majeure partie de notre existence.
Texte
d’Eric Weil, philosophe français du XXème
siècle
:
« Le travail, influant sur toute la vie humaine, a privé de
contenu l’otium et a transformé la nature ordonnée et
belle en source de matières premières et de forces utilisables,
comme […] a fait de Dieu un concept au lieu d’une présence –
il ne reste, sur le plan de la société, que le sentiment
nostalgique de quelque chose de perdu (ordre et beauté, luxe,
calme et volupté), et la recherche d’un Toi infini,
mais insaisissable et infiniment distant. »
Eric
Weil, Philosophie
politique,
II, B, 28, b, Paris, Vrin, Pages 101 – 102
B
/ Des conflits dans le monde du travail :
Le
travail aliénant est alors source, au sein des sociétés
capitalistes, d’une domination exercée par la classe bourgeoise
détentrice des moyens de production sur la classe prolétarienne,
c’est-à-dire les ouvriers qui ne peuvent que vendre leur force de
travail au capital pour survivre.
Ce
rapport de domination est alors le terreau d’un esprit de révolte
chez les prolétaires. Ils s’engagent alors dans une « lutte
des classes » (Marx)
afin d’inverser le rapport de force.
Selon
Marx, la lutte des classes est le schéma qui se répète
incessamment dans l’Histoire :
« L’histoire de toute société jusqu’à
nos jours n’a été que l’histoire de luttes de classes. »
Marx, Le
Manifeste du Parti communiste, 1848
En
effet, le prolétaire, dans l’Antiquité, était l’esclave, et le
bourgeois, le maître. La figure du prolétaire s’élevant contre
ses maîtres est alors Spartacus, esclave leader d’une révolte au
Ier
siècle avant Jésus-Christ. Il en va de même pour le rapport entre
l’aristocratie et le Tiers-Etat sous l’Ancien Régime français
par exemple.
Selon les marxistes, la lutte des classes existe encore aujourd’hui,
les prolétaires étant les ouvriers et les employés, et les
bourgeois étant les patrons. Le maître et l’esclave ont ainsi
seulement changé de noms au cours de l’Histoire, mais le schéma
reste le même (jusqu’à ce que la Révolution prolétarienne
triomphera) :
« La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de
la société féodale, n'a pas aboli les antagonismes de classes.
Elle n'a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles
conditions d'oppression, de nouvelles formes de lutte à celles
d'autrefois. »
Marx, Le Manifeste du Parti communiste, 1848
Cette
lutte moderne des classes ne prend pas seulement la forme de
discussions pacifiques (bien que mouvementées) entre les
représentants syndicaux de la masse salariale et le patronat :
en effet, cela peut donner lieu à des actes de violence, comme la
séquestration de membres du patronat, la menace de faire sauter
l’usine si le patronat ne cède pas aux exigences du syndicat, ou
encore la destruction des locaux de la sous-préfecture de Compiègne,
en 2009, par les syndicalistes CGT de l’usine Continental de
Clairoix emmenés par Xavier Mathieu. Cette destruction a eu lieu
sous l’effet de la colère suite à une décision n’allant pas
dans le sens du syndicat. Aux yeux des marxistes, c’est l’injustice
causée par les privilèges de la petite classe bourgeoise qui
justifie
de tels actes, et même la Révolution prolétarienne qui changera la
logique de l’Histoire :
« Tous les mouvements historiques ont été, jusqu'ici,
accomplis par des minorités ou au profit des minorités. Le
mouvement prolétarien est le mouvement spontané de l'immense
majorité au profit de l'immense majorité. »
Marx, Le Manifeste du Parti communiste, 1848
Ainsi,
alors que les bourgeois n’agissaient que dans leur intérêt
propre, les prolétaires affirment qu’ils agiront dans l’intérêt
de la majorité. Après la Révolution prolétarienne, le rapport de
force aura alors changé. Ce que prône Marx est d’instaurer la
« dictature du prolétariat », en vue de se passer, à
terme, de tout Etat.
Ainsi,
le travail peut devenir source de conflits violents au sein de la
société.
C
/ Le compromis :
approche raisonnable d’un conflit.
Définition :
Compromis : Accord obtenu par des concessions réciproques.
Afin
de résoudre ces conflits, il y a trois solutions :
Bien
que cela soit souhaitable, cela n’existe que très rarement dans
les faits. Ainsi, ne prôner que le consensus est utopique.
C’est
là l’option choisie par les marxistes : en faisant le constat
qu’il y a une lutte à mener pour dominer au lieu d’être dominé,
il faut se battre pour ses droits, car l’autre partie ne cédera
pas.
Cependant,
afin de sortir de cette logique du conflit, l’idéal, le plus
efficace, est de parvenir à un ensemble de compromis, à un
équilibre acceptable qui permettrait d’éradiquer petit à petit
les conflits présents dans le monde du travail. Cela serait plus ici
une approche allemande, alors que, traditionnellement, les français
préfèrent le conflit.
Conclusion :
Afin
de répondre à la question, nous sommes en mesure de dire que, bien
que le travail soit, de prime abord, considéré comme une activité
difficile à supporter pour l’homme, il semble être ce qui assure
la réalisation de l’essence humaine et la liberté de l’homme à
l’égard de la nature. Le travail est alors bien un fardeau, mais
un fardeau qu’il convient de porter pour être des hommes libres.
Il est également un fardeau pour la société en raison des conflits
qu’il peut engendrer, mais un fardeau dont il faut s’accommoder
pour vivre ensemble.
Notions
étudiées :
Principales :
Secondaires :
-
La
conscience
-
Le
désir
-
La
culture
-
La
religion
-
La
politique
-
La
société et l’Etat
-
La
justice et le droit
-
La
liberté
-
Le
bonheur
Sources :
Bibliographie :